Le PDG du groupe Casino, Jean-Charles Naouri, a livré son analyse de la situation macro-économique mondiale à l’occasion d’une interview aux Echos parue en janvier dernier. Selon lui, le Quantitative Easing (QE, ou achats d’actifs par les banques centrales) a permis de sauver l’économie mondiale lors de la crise sanitaire. Le patron du groupe de distribution stéphanois se veut résolument optimiste sur les perspectives économiques à moyen et long-terme, notamment boostées par l’innovation.
Les banques centrales, en premier lieu la FED américaine, « ont joué le rôle que l’on pouvait attendre » en étant « pragmatiques et déterminées » pour faire face aux disruptions causées à partir du printemps 2020 par la pandémie de Covid-19. Si la FED est traditionnellement « pro-business » et qu’elle « ne s’embarrasse pas de dogmes », la Banque Centrale Européenne (BCE), parfois taxée de dogmatisme anti-inflation, « s’est inspirée » de l’approche américaine, s’est réjoui Jean-Claude Naouri.
Des stratégies de rachats massifs d’actifs par les banques centrales, appelées Quantative Easing, qui sont, selon le patron du groupe Casino, « la principale cause de l’euphorie sur les marchés et dans l’économie ». « Lorsque l’on injecte plus de 10.000 milliards de dollars dans l’économie au nom du Quantitative Easing (QE), on ne peut pas être surpris que cela ait un impact majeur sur l’économie, les marchés, l’inflation et l’emploi », a-t-il poursuivi.
Les injections massives de liquidités par les banques centrales ont toutefois fait ressurgir ces derniers mois le spectre de l’inflation. Une menace limitée et conjoncturelle selon Jean-Charles Naouri, pour qui il ne s’agit en aucun cas de « l’inflation traditionnelle qui résulte d’un déséquilibre entre la production et la demande, lié à l’insuffisance des facteurs de production ». Le recours au QE aurait poussé les consommateurs à surconsommer à l’échelle globale, déséquilibrant provisoirement les marchés dans le sens de la demande en même temps que le Covid a provoqué des « fermetures d’usines et une disruption de la chaîne logistique ».
« Ce phénomène est ponctuel. Les déséquilibres qui provoquent l’inflation aujourd’hui ne sont pas inscrits dans la durée. Ils ne correspondent pas à une insuffisance structurelle des facteurs de production », a ajouté Jean-Charles Naouri, pour qui la production va progressivement retrouver son niveau normal et limiter sur le moyen-terme les dérapages inflationnistes que l’on observe actuellement.
Selon lui, la crise sanitaire a même permis d’accélérer des processus d’innovation, grâce à la révolution numérique, ce « qui va même avoir un impact positif sur les facteurs de production ». L’innovation et son accélération, y compris sur des métiers traditionnels que l’on ne pensait pas forcément pouvoir être impacés, représentent même pour Jean-Charles Naouri « la principale opportunité » de croissance et de développement.
« La vraie rupture c’est que nous n’avons pas affaire à des innovations gadgets mais à des innovations qui produisent de l’efficience. L’exemple de la livraison à domicile est parlant. Ce service existe depuis toujours mais n’était structurellement pas rentable en raison des coûts de préparation de la commande », a précisé le PDG de Casino, pour qui les entrepôts automatisés ont permis de faire passer les coûts de 10-15% à quelques pourcents, « créant ainsi un canal nouveau de distribution, la nouvelle offre créant progressivement une nouvelle demande ».
Et Jean-Charles Naouri de conclure en se réjouissant d’assister, « sur l’alimentaire », « avec 20 ans d’écart à ce qui s’est passé en non alimentaire avec l’amélioration massive de l’efficience en entrepôt permettant ainsi de créer un canal de consommation nouveau ».