La Cour des comptes a récemment mis en lumière le poids financier que représentent les déductions fiscales et sociales associées à l’épargne retraite en France. Avec un coût évalué à 1,8 milliard d’euros en 2024, cet avantage fiscal bénéficie principalement à des ménages aisés, selon la Cour. Ce constat soulève des questions sur l’efficacité et l’équité de ce dispositif.
Un dispositif aux bénéfices inégaux pour les ménages français
Selon la Cour des comptes, l’épargne retraite reste une niche dans le système français, ne représentant que 5,1 % des cotisations retraites et 2,3 % des prestations. L’une des principales critiques formulées est que ces avantages fiscaux sont majoritairement captés par des ménages à revenu élevé, disposant de moyens financiers suffisants pour optimiser leur fiscalité. Cette situation n’est pas sans conséquence pour l’État, qui perd ainsi des recettes importantes au profit de contribuables déjà favorisés.
D’après les chiffres, seuls 13 % des actifs détiennent un plan d’épargne retraite d’entreprise, et 10 % possèdent un produit individuel. Ces faibles taux de participation illustrent bien l’aspect inégalitaire du dispositif actuel. Il est également possible pour certains ménages de détenir simultanément ces deux types de produits d’épargne, amplifiant encore leur bénéfice fiscal.
Les coûts cachés des frais de gestion
Le rapport met aussi en évidence les frais de gestion associés à ces produits d’épargne. Les épargnants individuels voient souvent leur avantage fiscal entamé par des frais prélevés sur leurs placements. La Cour des comptes observe que des progrès peuvent être réalisés en matière de transparence et de réduction de ces coûts afin de rendre l’épargne retraite plus équitable et moins coûteuse pour les individus.
En outre, malgré la loi Pacte de 2019 censée apporter des réformes structurelles, les fonds issus de l’épargne retraite peinent à avoir un impact significatif sur le financement des entreprises. La Cour recommande ainsi que ces capitaux soient davantage dirigés vers les PME/ETI, comme encouragé par la récente loi Industrie Verte de 2023. L’objectif serait non seulement d’améliorer la rentabilité des fonds mais aussi de dynamiser l’économie locale.
Une utilisation limitée des fonds dans le financement économique
En 2022, l’épargne retraite en France a recueilli 18,5 milliards d’euros de cotisations, tandis que l’encours total atteignait 292,7 milliards d’euros. Malgré cette masse financière considérable, l’impact sur le financement économique demeure limité. La réforme de la loi Pacte avait pour objectif de rediriger ces fonds vers des investissements productifs, mais la mise en œuvre reste insuffisante selon la Cour. Ce constat critique appelle à une action plus déterminée pour faire de l’épargne retraite un outil efficace de soutien à l’économie réelle.
L’analyse de la Cour souligne la nécessité d’adapter le cadre réglementaire pour stimuler un investissement plus ciblé dans les secteurs clés de l’économie. Cela permettrait de renforcer le rôle de l’épargne retraite tout en maximisant ses effets positifs sur la croissance économique.
Vers une révision nécessaire des avantages fiscaux
Au vu des inégalités engendrées et des sommes importantes en jeu, la Cour des comptes suggère de réviser les avantages fiscaux liés à l’épargne retraite. Le but serait d’éviter les dérives actuelles où le dispositif sert davantage de placement optimisé pour les ménages fortunés que de véritable levier de préparation à la retraite pour l’ensemble des citoyens.
Il est demandé que cette révision prenne en compte les besoins de transparence et de réduction des frais de gestion. Cela pourrait être réalisé par l’introduction de mesures visant à limiter les avantages fiscaux disproportionnés que certains ménages parviennent à obtenir. Une telle action contribuerait à rendre le système plus juste et mieux aligné avec ses objectifs sociaux initiaux.
Propositions pour améliorer la transparence et l’efficacité
Pour remédier aux dérives actuelles, plusieurs propositions émergent :
- Renforcer la transparence des frais de gestion afin que les épargnants soient pleinement informés des coûts réels associés à leur épargne.
- Réorienter les fonds de l’épargne retraite vers des secteurs économiques prioritaires, notamment les PME et ETI, pour améliorer le soutien à l’économie réelle.
- Limiter les avantages fiscaux aux montants raisonnables afin d’éviter leur concentration auprès des seuls ménages aisés.
Ces propositions visent à équilibrer le double objectif de préparation à la retraite et de soutien économique, tout en rendant le système plus transparent et équitable.
En fin de compte, la réévaluation des avantages fiscaux liés à l’épargne retraite pourrait offrir une opportunité unique de repenser et de rationaliser un dispositif crucial pour l’avenir financier des citoyens tout en contribuant activement à la dynamique économique nationale.