L’état alarmant du régime de retraite des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers est devenu une nouvelle source de préoccupation pour les autorités françaises. Le déficit structurel, exacerbé par des facteurs démographiques et économiques, menace de s’aggraver dans les années à venir. Un rapport récent a souligné la nécessité de mesures correctrices urgentes pour éviter un gouffre financier. Cet article explore les principaux défis et solutions proposés pour redresser cette situation.
Un déficit croissant au fil des ans
Selon un rapport commandé par Matignon et publié par les inspections générales de l’administration, des affaires sociales et des finances, le régime de retraite des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers fait face à un déficit préoccupant. En 2023, ce déficit s’élevait déjà à 2,5 milliards d’euros. Sans intervention, il pourrait atteindre 3,8 milliards d’euros d’ici 2024 et culminer à 11,1 milliards d’euros en 2030. Ces chiffres dramatiques témoignent d’une dégradation continue due à un déséquilibre entre cotisants et pensionnés.
La dégradation du ratio démographique est particulièrement inquiétante. Alors qu’en 1980, on comptait plus de quatre cotisants pour un retraité, ce ratio est tombé à moins de 1,5 en 2022. Cette chute drastique s’explique en partie par une espérance de vie allongée et un nombre important de départs anticipés. Ces éléments ajoutent une pression supplémentaire sur les caisses du régime, qui a versé environ 26 milliards d’euros de prestations en 2023.
Propositions pour un rééquilibrage financier
Pour contrer ce déficit, le rapport propose plusieurs pistes de rééquilibrage financier. Parmi celles-ci, l’augmentation des cotisations des employeurs apparaît comme une mesure immédiate mais non sans conséquences. Selon les auteurs, ce taux devrait progressivement passer de 39,12 % en 2024 à 45,13 % en 2030 pour ramener le régime à l’équilibre. Toutefois, ils avertissent que cette augmentation pourrait augmenter le coût du travail pour les employeurs publics, les incitant à recruter davantage de contractuels plutôt que des fonctionnaires titulaires.
D’autres mesures suggérées incluent la participation accrue de l’État et d’autres administrations publiques pour aligner ce régime particulier avec ceux bénéficiant de transferts externes pour financer certaines prestations de solidarité. Par exemple, les inspecteurs recommandent que la majoration pour enfants soit remboursée par la Caisse nationale d’allocations familiales (CNAF) et que le Fonds de solidarité vieillesse finance d’autres prestations telles que le minimum invalidité.
Compensation interrégimes et dette
Le rapport souligne aussi l’importance de refondre le mécanisme de compensation interrégimes. Actuellement, ce système vise à équilibrer les charges entre différents régimes de retraite. Dans le cas présent, une reformulation pourrait impliquer l’affiliation de tous les fonctionnaires, y compris ceux exerçant à temps partiel, à la CNRACL. De plus, la dette de ce régime pourrait être reprise par l’État pour alléger la pression financière.
À court terme, une telle restructuration offrirait un certain répit. Cependant, les experts mettent en garde contre des impacts financiers négatifs à long terme, notamment une augmentation de la dynamique salariale et des droits à la retraite accumulés, entraînant potentiellement des déficits futurs accrus de 15 à 20 %.
Alignement des avantages familiaux
Une autre proposition concerne la rationalisation des avantages familiaux. Aujourd’hui, la CNRACL offre des majorations supplémentaires pour chaque enfant au-delà du troisième, majorant ainsi la pension de 5 % par enfant supplémentaire. Comparativement, au régime général, cette majoration est plafonnée à 10 %, quel que soit le nombre d’enfants. Alignant la CNRACL sur ce modèle, un décret en Conseil d’État supprimerait cette majoration additionnelle. L’objectif ici est de standardiser les avantages afin de maîtriser les dépenses à long terme tout en évitant des disparités injustifiables entre différents régimes de retraite.
Participation financière élargie
Enfin, le rapport appelle à une participation financière élargie, non seulement de la part de l’État mais aussi d’autres entités publiques. Inclure des prélèvements sur les salaires des contractuels pour compenser leur absence de cotisations régulières est l’une des méthodes proposées. Ce prélèvement viserait directement à atténuer l’impact de leur non-participation aux cotisations spécifiques exigées des fonctionnaires titulaires.
Il est clair que les solutions pour redresser ce régime de retraite sont nombreuses mais nécessiteront des efforts concertés et continus de toutes les parties prenantes. Avec les prévisions financières actuelles, il est impératif que des décisions stratégiques soient prises rapidement pour sécuriser l’avenir des retraites des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers. Les actions entreprises aujourd’hui détermineront la viabilité financière de ce régime pour les décennies à venir.