Alors que Cécile Duflot envisageait de construire 110.000 logements à l’horizon 2016 sur des terrains cédés par l’État à petit prix, seuls 3.000 créations sont actuellement sur les rails.
Pour doper la construction de logements, l’État a décidé de débloquer des terrains publics à bas prix. Mais la procédure est complexe et prendra bien plus de temps que prévu. Dès septembre 2012, la ministre du Logement de l’époque, Cécile Duflot, mettait en avant cette idée et promettait des résultats impressionnants. Il était alors question de plus de 900 sites appartenant à l’État (casernes, commissariats, terrains ferroviaires…) qui pourraient être vendus avant 2016 pour permettre jusqu’à 110.000 créations de logements à cet horizon. Des terrains cédés peu cher (avec une décote de 25 à 100%) en échange d’engagements importants sur le logement social.
Mercredi lors de la remise officielle à la ministre du Logement, Sylvia Pinel, du rapport sur la mise en œuvre de cette politique de «mobilisation du foncier public», le ton était différent. Il a, certes, été question «d’accélération de la dynamique» et de «phase opérationnelle» mais les objectifs sont désormais bien moins ambitieux. Pour l’instant, c’est une liste de 110 terrains publics prioritaires qui ont été identifiés par les préfets et qui devraient être vendus «majoritairement avant la fin 2015».
L’Etat compte notamment sur la Commission nationale de l’aménagement, de l’urbanisme et du foncier (CNAUF), présidée par le spécialiste du logement social Thierry Repentin, pour débloquer ces dossiers souvent complexes. Mise en place en juillet 2014, la Commission a désormais à son actif 11 ventes de terrains de l’Etat ainsi qu’une vente de terrain ferroviaire. Ces terrains ont été vendus pour 25 millions d’euros au total alors qu’au prix du marché, ils en valaient 27 millions de plus. L’ensemble doit permettre la création de 3.000 logements dont 2.000 logements sociaux avec notamment la transformation prévue de la caserne Mellinet à Nantes en quartier de 1500 logements ou la récupération d’un terrain de réseau ferré de France à Mantes-la-Jolie devant accueillir 270 habitations.
«Toutes ces ventes ont été réalisées avec des décotes supérieures à 25%, le maximum qui était toléré avant la loi de mobilisation du foncier public de 2013, rappelle Thierry Repentin. Cela prouve l’utilité du dispositif. Mais il crée une telle rupture dans les politiques publiques qu’il faudra sans doute 3 ou 4 ans pour qu’il rentre totalement dans les mœurs.» Pour remplir ses objectifs, la CNAUF compte sur la pédagogie afin de mieux présenter le dispositif à des collectivités locales qui ne sont pas toujours, et c’est un euphémisme, avides de logements sociaux. Il lui reste aussi à mener un gros travail sur Paris où le potentiel est important et où il faut notamment débloquer un dossier sur la cession d’un terrain de la DGCCRF dans la quartier de la Mouzaia (XIXe).
Logements de douaniers à réhabiliter
Les mécanismes de ventes de ces terrains pourraient évoluer. L’origine des terrains qui est appelée à s’élargir. Après les propriétés de l’Etat, de Réseau ferré de France, de la Ratp et de Voies navigables de France, un décret du 30 décembre 2014 permet de vendre également les terrains des hôpitaux en attendant ceux des établissements publics d’enseignement supérieur.
Initialement l’acheteur devait s’engager à construire en 5 ans mais l’expérience a montré que ce délai était trop court pour les programmes les plus ambitieux. Il est maintenant possible d’obtenir des dérogations. Ainsi, la vente de la caserne de Nantes s’est faite en levant cette contrainte des 5 ans, qui était impossible à respecter pour un quartier complet.
Thierry Repentin voudrait aussi étendre le dispositif à des logements à réhabiliter. Jusqu’à présent, la loi ne concerne que les terrains nus et les bâtiments à restructurer totalement, mais il s’est rendu compte qu’il existe aussi un important gisement de logements vides de douaniers ou de gendarmes qu’il suffirait de réhabiliter pour les rendre habitables.